Les appels d'offres
Condoliaison
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La moyenne d’âge des copropriétés québécoises dépasse désormais les 30 ans et plusieurs d’entre elles doivent ou devront bientôt procéder à d’importants travaux de réparation des parties communes. La mission première du syndicat, rappelons-le, consiste à assurer la conservation de l’immeuble.
La mise en concurrence des entreprises fournissant des services en cette matière permet donc aux syndicats de choisir, parmi les soumissions proposées par ces dernières, l’offre la plus concurrentielle, en gardant en mémoire que le prix ne constitue pas l’unique critère de sélection. La règle du plus bas soumissionnaire, dont on entend souvent parler, ne s’applique pas ici, en principe.
Il faut toutefois réaliser que les membres du conseil d’administration, pour la plupart bénévoles et sans expertise particulière en gestion immobilière, n’ont pas toujours les compétences requises pour apprécier les offres soumises. Ils doivent cependant administrer et gérer adéquatement le budget de la copropriété, avec prudence et diligence, dans l’intérêt du syndicat et de la collectivité des copropriétaires. Or, lorsque des travaux d’envergure sont envisagés ou nécessaires, comment garantir que ceux-ci seront bien effectués et que les coûts s’avèrent justifiés? C’est là qu’une procédure d’appel d’offres prend tout son sens, puisqu’elle permet de clarifier la portée des travaux et de bien établir les exigences du syndicat.
QU’EST-CE QU’UN APPEL D’OFFRES ?
Un appel d’offres, comme son nom l’indique, est une demande faite par un donneur d’ouvrage (en l’occurrence, un syndicat de copropriétaires) auprès d’un certain nombre d’entrepreneurs, afin que ceux-ci lui formulent une proposition d’exécuter les travaux projetés dans l’appel d’offres, au coût qu’ils estiment requis.
Un appel d’offres peut être ouvert à tous les entrepreneurs, dans un domaine spécifique (par exemple, les entrepreneurs spécialisés en maçonnerie) ou de façon plus générale, lorsque les travaux concernent plusieurs composants de l’immeuble et s’adressent à divers corps de métier. Ce seront alors des entrepreneurs généraux à qui on recourra. Ceux-ci indiqueront à ce moment-là, dans leurs documents de soumission, la liste des sous-traitants avec lesquels ils comptent effectuer le travail.
Un appel d’offres peut aussi se faire sur invitation. On s’adresse alors à un nombre restreint d’entrepreneurs, soit du domaine spécifiquement concerné, soit généraux, dépendamment des circonstances. Le choix des entrepreneurs invités relève du donneur d’ouvrage, généralement avec l’aide du professionnel retenu par celui-ci pour le guider dans ce choix et superviser les travaux par la suite. Selon le type de travaux envisagés, ledit spécialiste sera soit un ingénieur, un architecte ou un technologue professionnel. Et puisque les entrepreneurs sont connus dans le milieu, une « présélection naturelle » aura déjà été effectuée à ce moment. En copropriété divise, on observe fréquemment de tels appels d’offres sur invitation. On adresse habituellement l’appel d’offres à environ cinq ou six entrepreneurs, sachant à l’avance que la moitié seulement va répondre à l’invitation, dans la plupart des cas.
LA MISE EN CONCURRENCE
L’objectif d’un appel d’offres est de mettre en concurrence les divers soumissionnaires, afin d’identifier celui dont la soumission, de l’avis du donneur d’ouvrage – toujours appuyé par le professionnel retenu répond le mieux aux besoins du syndicat, en fonction notamment de son expertise et du prix qu’il propose. La soumission constitue donc l’offre de contracter qu’un entrepreneur soumet au donneur d’ouvrage, mais aucune obligation contractuelle n’est alors créée, entre le donneur d’ouvrage et les soumissionnaires.
Toutefois, le syndicat pourrait engager sa responsabilité extracontractuelle, en lançant un appel d’offres. Ce pourrait être le cas, entre autres si le processus est inéquitable ou faussé, volontairement ou involontairement. D’où l’importance de bien préparer et rédiger les documents d’appel d’offres, ainsi que de mener correctement le processus.
Les syndicats de copropriétaires sont tenus, comme toute autre personne physique ou morale, d’agir équitablement envers tous les soumissionnaires. Les articles 6, 7 et 1375 du Code civil du Québec exigent que tous se conduisent de bonne foi, dans leurs rapports contractuels ou autres. En agissant de façon abusive, discriminatoire ou inéquitable auprès d’un, voire plusieurs des soumissionnaires, le syndicat s’exposerait à des recours judiciaires en dommages-intérêts (art. 1457 C.c.Q.).
Un appel d’offres constitue un processus d’une certaine complexité, impliquant la confection d’un cahier de charges et de plans et devis, où l’on décrit en détail la portée des travaux, ainsi que les exigences et normes à respecter. On retrouve également des documents décrivant les conditions générales du chantier (date d’ouverture, date estimée de fin; fourniture d’électricité, de sanitaires, protection hivernale (le cas échéant); couverture minimale d’assurances; exigences quant à un cautionnement d’exécution (le cas échéant); liste des sous-traitants (le cas échéant); surveillance du chantier (le cas échéant), etc.) et des conditions particulières, couvrant notamment les règles et modalités de rédaction, de réception et d’ouverture des soumissions.
Tout cela implique des coûts additionnels; on comprend donc que le processus d’appel d’offres est surtout réservé aux travaux d’une certaine envergure. Il n’existe toutefois pas de norme précise à ce sujet.
UN SYNDICAT DE COPROPRIÉTAIRES EST-IL OBLIGATOIREMENT TENU DE FAIRE PRÉPARER UN APPEL D’OFFRES?
De façon générale, les syndicats de copropriétaires ne sont pas tenus légalement de faire préparer des appels d’offres lorsqu’ils entreprennent des travaux. Le choix leur revient de le faire, selon les circonstances, notamment en raison de la complexité ou de l’ampleur des travaux. L’avis du professionnel du bâtiment prend ici toute son importance, tout comme le devoir de prudence et diligence qui s’adresse aux administrateurs.
Un syndicat peut toutefois décider d’assujettir un appel d’offres au processus établi par le Bureau des soumissions déposées du Québec (BDSQ). Celui-ci prévoit des règles structurées bien strictes, en plus de garantir un fort degré d’impartialité. Pour certains types de travaux spécialisés, particulièrement des travaux de plomberie et d’électricité, le recours au BDSQ pourrait même être requis.
Bien que cela soit très peu fréquent, un syndicat pourrait également être tenu, en vertu d’une disposition de la déclaration de copropriété, de procéder à un appel d’offres lorsqu’il entreprend certains types de chantiers ou des travaux dont les coûts dépasseront une certaine somme.
Quoi qu’il en soit, lorsque les travaux s’avèrent d’envergure, il devient en somme impératif de suivre un processus d’appel d’offres bien structuré, supervisé par un professionnel du bâtiment. Cela inclut généralement une surveillance des travaux par ce professionnel, à diverses étapes charnières d’avancement, ce qui fournit une garantie additionnelle de qualité des travaux. À elles seules, les règles de prudence et de diligence élémentaires qui s’imposent aux membres d’un conseil d’administration justifient de s’y prêter. On réduit ainsi considérablement les risques d’imprécision dans la portée des travaux, de même que les erreurs et les poursuites éventuelles.
UN SYNDICAT DE COPROPRIÉTAIRES EST-IL OBLIGÉ DE RETENIR LES SERVICES DU PLUS BAS SOUMISSIONNAIRE?
Non, il n’existe aucune obligation de confier le contrat au plus bas soumissionnaire, sauf si le syndicat s’y est engagé, aux termes des conditions de l’appel d’offres. Un syndicat de copropriétaires peut même se réserver le droit de ne choisir aucune des soumissions dans le document d’appel d’offres.
Par ailleurs, le prix proposé par les différents entrepreneurs soumissionnaires ne constitue pas l’unique critère à considérer en vue d’octroyer le contrat. Certains détails, certaines précisions qu’un soumissionnaire prévoit dans sa soumission pourraient aussi entrer en ligne de compte, afin de départager les différentes offres.
QU’EST-CE QU’UN CAUTIONNEMENT D’EXÉCUTION?
Les documents d’appel d’offres requièrent parfois que les entrepreneurs fournissent un cautionnement d’exécution. Il s’agit en fait d’un engagement, par une tierce entreprise, qui vient ainsi assurer soit le parachèvement des travaux par elle-même, soit le paiement du coût des travaux qui seraient à parachever et qui seraient effectués par un autre entrepre neur, en cas d’incapacité du soumissionnaire choisi de terminer les travaux – pour cause de faillite ou autre raison.
Un tel cautionnement d’exécution augmente davan tage les coûts globaux d’un appel d’offres; on comprend donc que cette exigence sera généralement réservée aux cas les plus importants.
CONCLUSION
Un processus d’appel d’offres constitue ni plus ni moins une « police d’assurance » pour les syndicats de copropriétaires qui entreprennent des travaux de réfection ou de réparations majeures dans l’immeuble. On réduit alors les risques de défauts d’exécution et de malfaçons, de façon importante. Il ne faut pas négliger cet apport, nonobstant les coûts que cela implique.
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