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Caméras de surveillance en copropriété

Peut-on en installer?

Condoliaison

Condoliaison 25-1 Printemps 2024

 Il est de plus en plus courant de voir des propriétés munies de caméras de surveillance. Les gens veulent protéger leurs biens, surtout avec les nombreux colis livrés et laissés sur le pas de la porte. En copropriété, les copropriétaires ont-ils le droit d’installer des caméras? Si oui, dans quel contexte est-ce envisageable?

La vie en copropriété est régie par un ensemble de règles différent de celui qui encadre les droits et responsabilités des propriétaires d’unités d’habitation unifamiliales. La ligne est mince entre le droit de se protéger d’un copropriétaire et le droit à la vie privée de ses voisins de palier. Où se situe cette limite?

La déclaration de copropriété, toujours s’y reporter

Selon Condolegal.com, une caméra de surveillance « est généralement installée dans les parties communes, a pour objet de surveiller à distance les allées et venues à l’intérieur ou aux alentours de l’immeuble dans le but de prévenir ou de constater des délits ou des nuisances (cambriolages, agressions, méfaits, etc.). »

Un copropriétaire a-t-il le droit de faire installer des caméras?

Consultez d’abord la déclaration de copropriété afin de vérifier si l’installation de caméras de surveillance est permise. Ensuite, une demande doit être faite au syndicat de copropriété.

Dans une partie privée, chacun peut installer toutes les caméras qu’il souhaite. Ce n’est pas le cas pour les parties communes ou communes à usage restreint, tel que les couloirs, le balcon et l’espace de stationnement d’un copropriétaire. L’installation de caméras de surveillance est alors considérée comme un ajout, un changement ou une modification aux parties communes. Qu’on se le tienne pour dit : on ne peut rien modifier aux parties communes sans passer par l’assemblée des copropriétaires.

Processus de décision pour l’installation des caméras de surveillance

La demande pour l’installation de caméras de surveillance pour une partie commune a été faite au conseil d’administration et celui-ci décide d’aller de l’avant avec le projet. Comment faut-il procéder?

Patrick Aird, gestionnaire et administrateur de copropriété externe au sein d’Équipe Proprio-Gestion, présente les meilleures pratiques développées au fil du temps.

1. Lors d’une assemblée ou à l’aide d’un sondage informel, demandez aux copropriétaires de l’immeuble s’ils aimeraient avoir des caméras de surveillance à divers endroits. Le but de ce sondage est de connaître leur opinion et de savoir combien de personnes désirent aller de l’avant ou non avec ce projet afin de décider s’il en vaut la peine d’entreprendre les nombreuses démarches nécessaires.

  • À ce moment, il est important de discuter de certaines modalités: où les caméras seront-elles placées? Qui pourra visionner les vidéos et pour quelles raisons? Pendant combien de temps les vidéos seront-elles gardées?

2. Consultez un avocat ou un notaire pour faire rédiger un amendement qui sera ajouté à la déclaration de copropriété.

  • Puisque vous avez déjà discuté des différentes modalités avec les copropriétaires, vous pouvez donner ces informations à l’avocat ou au notaire.
  • Une politique qui inclura ces modalités devra être rédigée.
  • Pendant ce temps, magasinez l’équipement de surveillance.
  • Dans l’amendement, prévoyez si le copropriétaire peut ou non avoir une sonnette caméra selon la conception de l’immeuble.

3. Maintenant que l’amendement est rédigé, il faut le présenter à l’assemblée afin de le faire accepter ou non par les copropriétaires. Selon l’article 1097 C.c.Q., modifié avec la « loi 16 », pour considérer l’amendement comme accepté, ça prend une décision en faveur prise par les copropriétaires, représentant 75 % des voix des copropriétaires présents ou représentés par procuration à l’assemblée.

C'est un oui

      • Ajoutez l’amendement et la politique à la déclaration de copropriété.
      • Conservez l’amendement au registre.
      • Procédez à l’installation des caméras de surveillance.

C’est un non

      • Vous pouvez réessayer l’année prochaine, mais aucune caméra ne sera installée d’ici là.

L’installation de caméras de sécurité dans une copropriété demeure cependant un exercice délicat. Il faut pouvoir justifier cette installation, par exemple en raison de vols à répétition ou de vandalisme dans la copropriété, car certains pourraient y voir une atteinte à leur vie privée.

« Même si l’amendement est accepté, il ne faut pas perdre de vue la vie privée des copropriétaires. Ce n’est pas parce qu’il y a des caméras qu’on renonce pour autant à sa vie privée. Limitez celles-ci aux endroits essentiels », met en garde Alexandre Fournier, avocat spécialisé en litige civil, commercial et assurances, en droit administratif, et en droit municipal au sein du cabinet Dunton Rainville.

Comment concilier le droit à la vie privée et la surveillance?

Si certains désirent installer des caméras, il faut poser les questions suivantes : Que cherchent-ils à prévenir? Le vol de colis, de voiture ou la violation de domicile? Dans ce cas, Me Alexandre Fournier conseille de « limiter les caméras à l’essentiel. »

Si les livreurs doivent laisser les colis à l’accueil, nul besoin de mettre des caméras aux étages supérieurs. Advenant l’installation de caméras, on doit s’assurer de préserver la vie privée des copropriétaires. Il est plutôt difficile de ne pas filmer les résidents si des caméras sont installées dans les couloirs. Le conseil susmentionné demeure pertinent, soit limiter les caméras aux endroits essentiels.

Dans le cas où le syndicat va de l’avant avec ce projet, voici quelques astuces à retenir pour respecter le droit à la vie privée et éviter de nombreux problèmes :

  • Le syndicat doit ABSOLUMENT informer les résidents de la présence de caméras.
  • Les caméras doivent être bien visibles, aucune caméra cachée.
  • Les caméras ne doivent pas viser une ou plusieurs unités en particulier (portes d’entrée, balcons, terrasses et fenêtres des résidents, ou résidents eux-mêmes).

C’est une question de vie privée.

Loi 25 : politique de la vie privée

Le 22 septembre 2022, la loi 25 est entrée en vigueur avec « des dispositions législatives en matière de protection des renseignements personnels dans le secteur privé », peut-on lire dans le communiqué de presse du gouvernement.

Concrètement, cette loi touche chaque entreprise, organisme public, citoyen (et syndicat de copropriété) et concerne les enjeux entourant la confidentialité des données personnelles. Dans cette optique, tenir un registre relatif aux enregistrements des caméras, qui contiennent, par leur nature, des renseignements personnels, est judicieux.

Voici les informations qui devraient figurer dans le registre des enregistrements :

  • Raison du visionnement;
  • Date du visionnement;
  • Personne qui a visionné l’enregistrement;
  • Date où l’enregistrement a été fait;
  • Gardien des enregistrements.

La loi 25 offre au citoyen un meilleur contrôle sur ses renseignements personnels. Dans le cas d’une copropriété, où le syndicat gère les données personnelles des copropriétaires, il est vital de se conformer aux exigences. Il l’est encore plus si des caméras de surveillance sont installées et des informations sont recueillies. Ayez en tête de :

  • Limiter l’accès aux enregistrements à un nombre restreint de personnes;
  • Ne permettre aucun visionnement par les copropriétaires;
  • Ne jamais diffuser ou transmettre des enregistrements vidéo à des tiers (seule exception : lors d’une enquête des services de police ou judiciaires).

L’important dans l’installation de caméras de surveillance dans une copropriété est de comprendre que vous n’êtes pas seul : vos voisins veulent avoir une vie privée… privée.

Consultez l’article « La loi 25 et la protection des données personnelles » paru dans l’édition de l’hiver 2023 du Condoliaison vol. 23-4 pour approfondir ce sujet.

 

Questions en rafale

Si un copropriétaire installe des caméras dans les parties communes (ou communes à usage restreint) sans l’accord du syndicat, que doit faire le gestionnaire?

Le retrait des caméras doit être exigé et les dommages (trous dans les murs ou au plafond, etc.) doivent être réparés. Si la personne ne veut pas enlever ses caméras, une mise en demeure doit être envoyée. Si cela ne règle pas la situation, il faudra recourir à une demande d’injonction.

Quels sont les risques de laisser un copropriétaire installer des caméras dans les parties communes à usage restreint?

Il y a des risques de poursuites par un autre copropriétaire.

Dans une unité unifamiliale ou en rangée en copropriété où la porte est au niveau de la rue devant le stationnement, est-ce possible de mettre une caméra pour protéger la réception de colis ou prévenir le vol de voiture?

Le plus simple est d’en faire la demande au syndicat afin de la faire approuver.

Plus de 75 % des voix des personnes présentes ou représentées à l’assemblée ont voté pour l’installation de caméras de surveillance. Est-ce que les caméras seront là pour toujours? Si les copropriétaires changent d’idée après un certain temps, peuvent-ils révoquer cette décision?

Absolument. Il suffit de refaire le processus de décision, dans le sens inverse. Comme le dit David Ménassé, président d’Équipe Proprio-gestion : « C’est éternel… jusqu’au moment où c’est annulé.

  • Les caméras des voitures

    Les caméras de surveillance de certaines voitures présentent les mêmes enjeux que les caméras de surveillance résidentielle. Le copropriétaire devrait désactiver les caméras de son véhicule lorsque celui-ci est stationné, et ce, autant dans le stationnement extérieur qu’intérieur.
  • Les coûts

    Sachez que les coûts reliés à l’achat et à l’installation de caméras de surveillance ne peuvent être payés par le fonds de prévoyance. Avant d’entreprendre tout ce processus, assurez-vous d’avoir les moyens de vos ambitions.

 

Condoliaison 25-1 printemps 2024