Cotisations non payées : recours, options et impacts sur la vie de condo
Condoliaison
La vie en copropriété présente un cadre de vie unique, une petite (ou grande) communauté.
Toutefois, la réalité est qu’il s’agit d’un équilibre délicat. Devoirs et obligations, droits, responsabilités, chacun a son rôle à jouer pour maintenir un environnement où il fait bon vivre. Et, inévitablement, de temps à autre, des conflits et des différends surviendront.
Tous les aspects financiers sont entre autres au cœur de l’activité et de la vie en copropriété et peuvent devenir une source importante de préoccupations pour les administrateurs, les gestionnaires et les copropriétaires eux-mêmes. Afin d’assurer l’entretien courant de l’immeuble et le fonctionnement de la copropriété, de même que des travaux de réparations majeurs ou de remplacement des parties communes, le syndicat des copropriétaires doit engager un certain nombre de frais et percevoir les sommes nécessaires auprès des copropriétaires.
Bien sûr, les charges communes – communément appelées « frais de condo » ou cotisations, et réparties en fonction de la valeur relative de chaque fraction - doivent être payées en temps opportun par tous les copropriétaires, ce qui contribue à maintenir la santé financière de la copropriété.
Si le défaut de paiement des charges communes est un des différends les plus courants à survenir en copropriété, que peut faire le syndicat de copropriétaires face à un copropriétaire qui refuse d’acquitter ses charges communes? Quels sont ses recours? Au besoin, comment financer des travaux quand il y a un manque à gagner?
Il est donc essentiel que les copropriétaires honorent leurs obligations financières en respectant les délais. Encore faut-il que chaque copropriétaire s’acquitte de ses paiements!
RÉCUPÉRATION DES CRÉANCES – COMMENT RECOUVRER DES FRAIS DE CONDO
D’abord, il faut savoir que c’est au conseil d’administration du syndicat que revient le rôle de veiller au recouvrement des frais communs de condo. Le syndicat doit ainsi engager les démarches nécessaires pour percevoir les sommes impayées. Parfois, une action juridique peut devenir le seul moyen pour le syndicat de percevoir ces créances. Voici les principaux droits et recours de recouvrement dont dispose un syndicat de copropriétaires :
- MISE EN DEMEURE. Sous forme de lettre écrite, signée par un avocat, la mise en demeure exigera le paiement de la dette au copropriétaire, dans le délai raisonnable pour régler le litige indiqué par le syndicat.
- RECOURS EN JUSTICE. Si l’envoi d’une mise en demeure ne donne aucun résultat, le syndicat pourra poursuivre un mauvais payeur aux petites créances. Action relativement simple et peu coûteuse, elle permet au syndicat de se représenter sans avocat, bien que ce dernier puisse l’assister dans ses démarches judiciaires. À noter que la somme demandée ne doit pas excéder 15 000 $, sans tenir compte des intérêts.
- HYPOTHÈQUE LÉGALE. En vertu de l’article 2729 du Code civil du Québec, le syndicat peut garantir sa créance envers le copropriétaire en défaut par une hypothèque légale. L’hypothèque pourra être inscrite par avis contre la fraction du copropriétaire si ce dernier est en défaut de paiement de plus de 30 jours, et indiquera le montant exigible au jour de l’inscription. L’hypothèque légale ouvre la porte à l’exercice, par le syndicat, pour un recours hypo thécaire contre l’unité du copropriétaire défaillant. L’hypothèque légale est un moyen de garantir le paiement des sommes dues au syndicat, advenant qu’il fasse vendre l’unité du copropriétaire concerné.
- PRÉAVIS D’EXERCICE ET RECOURS HYPOTHÉCAIRE. Si le défaut de paiement n’est toujours pas résolu, malgré l’avis d’hypothèque légale publié, le syndicat pourra faire publier un avis d’hypothèque légale au Registre foncier du Québec. À l’expiration du délai de 60 jours suivant la publication de ce préavis, il pourrait également instituer un recours hypothécaire, comme prévu par l’article 2758 du Code civil du Québec, lequel permet notamment, la vente sous contrôle de justice, c’est-à-dire qu’ultimement, le syndicat peut faire vendre en justice la fraction du propriétaire en défaut de paiement.
VENTE DE L’UNITÉ PAR LE COPROPRIÉTAIRE AVANT LE RECOUVREMENT DES CHARGES IMPAYÉES
Il importe de savoir que les charges communes sont payables par celui qui est propriétaire de la fraction au moment où elles sont exigibles, incluant les possibles charges extraordinaires à venir qui seraient connues au moment de l’achat.
Ainsi, en vertu de l’article 1069 du Code civil du Québec, l’acheteur est tenu au paiement avec les intérêts de toutes les charges communes dues par le vendeur. Le syndicat pourra réclamer les sommes à l’acheteur. Attention! Si l’acheteur fait une demande concernant l’état des charges communes au syndicat avant la vente définitive, soit par le notaire, et que le syndicat omet d’y répondre dans les 15 jours suivant la demande, le paiement ne pourra pas être réclamé au nouveau copropriétaire.
FINANCER DES TRAVAUX QUAND IL Y A UN MANQUE À GAGNER
Les syndicats ont l’obligation de veiller à disposer de fonds suffisants pour couvrir l’ensemble de leurs parties communes et de leurs actifs, et pour remplir leurs engagements financiers.
Annuellement, le conseil d’administration produit un budget qui intègre le coût des travaux d’entretien ou de conservation des parties communes. Dans ce budget, l’argent provient pour l’essentiel des charges communes. Au Québec, chaque copropriété doit aussi se doter d’un fonds de prévoyance suffisant qui servira à réaliser les travaux majeurs dans une copropriété ou à effectuer des réparations ou des remplacements des parties communes qui ont atteint leur durée de vie utile. Ce fonds est essentiel et permet de conserver l’immeuble en bon état.
Assumer sa juste part des charges communes signifie donc contribuer aux opérations courantes ainsi qu’au fonds de prévoyance; la participation des copropriétaires à celui-ci étant d’au moins 5 % de leurs contributions aux charges communes.
Un déficit à combler en raison de charges communes non payées pourrait donc potentiellement impacter ou retarder des travaux importants ou nuire à la conservation de l’immeuble.
Si le syndicat ne dispose pas des sommes requises ou que le fonds de prévoyance ne peut pas être utilisé ou est insuffisant pour faire les travaux (ou pour faire face à des dépenses qui n’ont pas été prévues dans le budget annuel de la copropriété), les administrateurs peuvent recourir à la levée d’une cotisation spéciale.
COTISATION SPÉCIALE (APPEL DE CHARGE PARTICULIER)
Que faire pour éponger le manque à gagner? « S’il n’y a pas suffisamment d’argent dans le fonds d’opération, car des copropriétaires ne participent pas, il ne faut pas emprunter dans le fonds de prévoyance, met en garde Aline Désormeaux, associée chez Désormeaux Patenaude inc. Il faut absolument lever une cotisation spéciale ou emprunter si requis. »
Concrètement, cet appel de charge particulier se traduit par une demande du syndicat à ses copropriétaires, qui réclamera les sommes que chacun d’eux doit verser. Comme les charges communes, le total de la cotisation spéciale sera réparti selon la quote-part de chacun des copropriétaires. Bémol : les appels de charge importants pourraient aussi mettre en difficulté d’autres copropriétaires...
À noter que le conseil d’administration a l’obligation de consulter l’assemblée des copropriétaires, mais, comme pour le budget annuel, aucun vote n’est requis de la part des copropriétaires.
EMPRUNTER
Les travaux peuvent aussi être financés par un prêt bancaire, permettant au syndicat d’obtenir les fonds nécessaires à la réalisation des travaux. Le prêt peut être contracté directement par le syndicat de copropriétaires; il reviendra au conseil d’administration d’en négocier les termes auprès de l’institution financière.
C’est le syndicat qui effectuera les remboursements et il récupérera les sommes à même les charges communes que paient les copropriétaires.
Une autre solution également possible pour les syndicats qui ne peuvent faire face à une cotisation spéciale est de faire appel au programme de financement aux copropriétés du RGCQ (voir l’article à ce sujet dans ce numéro).
Chaque copropriétaire a l’obligation légale de s’acquitter de ses charges communes de la copropriété. Toutefois, force est de constater que ce ne sont pas tous les copropriétaires qui paient leurs charges communes à leur échéance. Les dangers posés par le mauvais payeur sont bien réels et cela peut pénaliser l’ensemble des copropriétaires, voire paralyser le fonctionnement de la copropriété. Bien qu’il y ait plusieurs recours pour récupérer les sommes, les démarches peuvent prendre du temps et être ultimement coûteuses. C’est pourquoi le syndicat de copropriétaires doit se montrer vigilant et agir rapidement pour percevoir les sommes dues.
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