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Projet de loi 41

Commentaires du RGCQ

Mémoires et avis

Monsieur le Ministre,

Tout d’abord, le RGCQ tient à saluer le dépôt du projet de loi 41 et en particulier des articles qui touchent la copropriété divise. Presque un an après l’entrée en vigueur du projet de loi 141, en décembre 2018, une révision de certaines de ses dispositions est nécessaire. Nous accueillons favorablement la plupart des modifications proposées et apportons quelques recommandations.

Ce document présente les commentaires et observations du RGCQ relativement aux articles 199 à 204 et 247 alinéa 4 du projet de loi 41.

Franchise déraisonnable

L’article 199 du projet de loi prévoit de modifier comme suit l’article 1073 du C.c.Q.

1073. Le syndicat a un intérêt assurable dans tout l’immeuble, y compris les parties privatives. Il doit souscrire des assurances prévoyant une franchise raisonnable, contre les risques usuels couvrant la totalité de l’immeuble, à l’exclusion des améliorations apportées par un copropriétaire lorsqu’elles peuvent être identifiées par rapport à la description de cette partie. Le montant de l’assurance doit pourvoir à la reconstruction de l’immeuble conformément aux normes, usages et règles de l’art applicables à ce moment; ce montant doit être évalué au moins tous les cinq ans par un membre d’un ordre professionnel désigné par règlement du gouvernement.

Il doit aussi souscrire une assurance couvrant sa responsabilité envers les tiers ainsi que celle des membres de son conseil d’administration et du gérant, de même que du président et du secrétaire de l’assemblée des copropriétaires et des autres personnes chargées de voir à son bon déroulement.

Le gouvernement peut, par règlement, déterminer des cas selon lesquels une franchise est considérée comme déraisonnable. De plus, un contrat d’assurance souscrit par un syndicat couvre de plein droit au moins les risques prévus par règlement du gouvernement, à moins que la police ou un avenant n’indique expressément et en caractères apparents ceux de ces risques qui sont exclus. Ces règlements peuvent établir des catégories de bâtiments, notamment en fonction de leur taille, de leur valeur et de leur situation géographique.

La modification proposée convient au RGCQ. Néanmoins, nous tenons à rappeler que le montant d’une franchise raisonnable pour un syndicat, par copropriétaire, devrait être similaire au montant d’une franchise en habitation unifamiliale. Le critère de raison devrait être évalué, avant tout, sur la capacité de paiement des assurés. 

Si le gouvernement décide de se prévaloir de son pouvoir réglementaire en la matière, le RGCQ formulera des recommandations quant aux cas qui peuvent conduire à considérer une franchise comme déraisonnable.

L’article 247, alinéa 4, précise simplement la date d’entrée en vigueur de cette modification. Celuici ne soulève aucune observation de la part du RGCQ.

Article 1074.2

L’introduction de l’article 1074.2 dans le projet de loi 141 a causé de nombreux problèmes aux syndicats de copropriété. Ils ont été confrontés au refus de la quasi-totalité des assureurs en responsabilité de copropriétaires de les indemniser pour les montants des franchises déboursés en cas de sinistre émanant d’une partie privative. L’interprétation par les assureurs de cet article a mené à cette situation difficile. Il est donc opportun pour le gouvernement de proposer une modification à cet article afin de revenir au droit existant avant l’adoption du projet de loi 141.

Cependant, la modification proposée à l’article 200 du projet de loi ne nous paraît pas suffisante pour atteindre cet objectif.

Le second alinéa de l’article 1074.2 prévoit toujours l’interdiction de toute stipulation contraire, ce qui semblerait faire obstacle aux dispositions de la plupart des déclarations de copropriété qui rendent notamment le copropriétaire responsable des fautes ou faits de ses locataires, invités ou occupants. Cette précision est néanmoins bienvenue pour protéger les syndicats et les copropriétaires d’accords auxquels ils ne sont pas partie, comme toute convention conclue entre des assureurs. Nous ne souhaitons donc pas que cette stipulation disparaisse. Étant donné que l’objectif est de revenir à l’ancien régime tout en conservant cette protection, nous proposons la modification suivante :

1074.2. Les sommes engagées par le syndicat pour le paiement des franchises et la réparation du préjudice occasionné aux biens dans lesquels celui-ci a un intérêt assurable ne peuvent être recouvrées des copropriétaires autrement que par leur contribution aux charges communes. Est réputée non écrite toute disposition qui déroge à cette règle.

Cependant, le syndicat peut réclamer des dommages-intérêts d'un copropriétaire tenu de réparer le préjudice causé par son fait ou sa faute, et dans les cas prévus au présent code ou à la déclaration de copropriété, le préjudice causé par le fait ou la faute d'une autre personne ou par le fait des biens que l’un ou l’autre a sous sa garde.

La règle devient alors très claire pour tous et la situation devrait revenir à la normale, au bénéfice de tous les copropriétaires québécois.

Description des parties privatives

Les articles 201 à 204 de ce projet de loi apportent plusieurs modifications relatives à la description des parties privatives.

Tout d’abord, l’article 204 définit un mode d’adoption de cette description, par le biais d’une double majorité ad hoc en assemblée, qui ne se retrouve nulle part ailleurs dans les articles du Code civil traitant de copropriété. En effet, la description des parties privatives devrait obtenir, lors d’une assemblée, « l’approbation d’une majorité des copropriétaires, représentant plus de la moitié des voix de tous les copropriétaires présents ou représentés. » En plus d’être inédite, cette majorité devrait s’éteindre à la fin du délai prévu pour l’adoption de la première description des parties privatives (en l’état, le 13 juin 2020).

Des précisions autour de la procédure d’adoption de la description des parties privatives sont bienvenues. Leur absence dans le projet de loi 141 a créé de la confusion. Cependant, cette disposition soulève plusieurs problèmes : elle complexifie le processus d’adoption et le déroulement des assemblées ; elle rend incertaine la situation des syndicats qui ont déjà adopté leur description des parties privatives en ne prenant pas en compte cette majorité particulière (pour cause, elle n’existait pas). Par conséquent, nous recommandons d’amender l’article 204 pour prévoir que l’adoption de la description des parties privatives relève de l’article 1096 du Code civil et qu’il faille disposer, simplement, d’une majorité des voix des copropriétaires présents ou représentés à l’assemblée.

L’article 201 du projet de loi prévoit que la modification de la description des parties privatives relève de l’article 1097. Dans un souci de clarté, il serait logique que la modification de cette description suive le même processus que son adoption. Le calcul des quorums, des majorités et des votes au cours des assemblées est un exercice déjà complexe. Il y aurait lieu ici de simplifier les majorités pour s’assurer que ces procédures soient suivies de manière uniforme. Nous recommandons donc d’amender l’article 201 du projet de loi pour que la modification de la description des parties privatives visée à l’article 1070 relève de l’article 1096 du Code civil.

Par ailleurs, dans l’article 204, le projet de loi rappelle le délai du 13 juin 2020 pour procéder à cette adoption. Considérant l’absence de communication publique de la part du gouvernement autour de cette nouvelle obligation et les réalités vécues par les copropriétés (rythme des assemblées, manque de formation), ce délai devrait être repoussé d’au moins six mois. Nous recommandons donc que l’article 204 soit amendé pour que le délai maximal d’adoption de la description des parties privatives soit le 13 décembre 2020.

L’abrogation de l’article 653 de la Loi visant principalement à améliorer l’encadrement du secteur financier, la protection des dépôts d’argent et le régime de fonctionnement des institutions financières (2018, chapitre 23) est une bonne chose. Le RGCQ se range sans réserves derrière l’article 202 du projet de loi.

Enfin, il est important d’intégrer dans la loi des conséquences lorsque le promoteur ne respecte pas son obligation de fournir une description des parties privatives. Il faudrait mentionner qu’en l’absence de production par le promoteur de ce document, dans les copropriétés constituées à partir du 13 juin 2018, le syndicat fera produire cette description aux frais du promoteur.

Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de nos salutations distinguées